De père en fille, dans la complicité, la collaboration et l’équilibre

Articles - Image d'intro
Si chaque transaction entre un cédant et un repreneur est unique, avec des enjeux humains, opérationnels et stratégiques différents, celles entre membres d’une même famille sont marquées par le lien affectif qui les unit. Martin et Alexandra Rousseau de Rovibec sont une preuve que la complicité, la collaboration et l’équilibre sont possibles à travers les méandres du repreneuriat. 
Martin et Alexandra Rousseau, respectivement PDG et ingénieure industrielle et relève, ont partagé leur expérience de transfert familial lors de la Matinée repreneuriat organisée par les Manufacturiers Mauricie Centre-du-Québec et présentée par BCF et le CTEQ, en janvier dernier.  Alors que le transfert entre le père et son paternel n’a été pas un long fleuve tranquille, celui entre lui et sa fille se déroule dans la bienveillance. Retour sur ce témoignage-panel dont l’animation a été assurée d’une main de maître par Charles-André Morel, directeur équipe-conseil du Centre de transfert d'entreprise du Québec (CTEQ).

Rovibec a été fondée il y a près de 50 ans par Victor Rousseau, le père de Martin et le grand-père d’Alexandra. La PME compte aujourd’hui environ 65 employés. Elle conçoit et fabrique des équipements dans l’automatisation agricole de A à Z. La grande partie de leur chiffre d’affaires provient du Québec et du Canada, et depuis une vingtaine d’ailleurs, notamment de l’Europe, du Japon, de l’Australie et de l’Amérique du Sud. Depuis peu, un robot industriel transporteur de palettes est aussi fabriqué dans l’usine située à Nicolet. 

Martin Rousseau a commencé tout jeune dans l’entreprise de son père, qui était reconnu comme un «patenteux», à l’instar de bien des grands bâtisseurs québécois. Alors qu’il faisait son cours en génie mécanique, déjà, il ne se voyait pas faire autre chose que de travailler au sein de l’entreprise familiale avec qui il avait grandi, puis de prendre la relève de son père un jour. Le cheminement jusqu’à aujourd’hui n’a pas toujours été sans remous. Il a souvent eu des visions différentes de celles de son père, jusqu’à quitter l'organisation à un certain moment, pour mieux revenir. Au fil des ans, la confrontation a fait place à une meilleure communication. 

«Mon père est un génie pour faire des machines. Ce talent-là, moi je ne l’ai pas. Je suis plus au niveau de la commercialisation et du développement des affaires», raconte celui qui compte sur la présence d’un ingénieur clé au sein de l’entreprise. La vision du fils était celle d’une entreprise internationale, avec un produit solide et éprouvé. Son père, lui, souhaitait vendre un nouveau produit dès qu’il était né, tout droit sorti des plans. L’embauche d’un directeur général en 2015, qui faisait le pont entre lui et son paternel, a aussi été bénéfique. Puis son père s’est retiré graduellement des opérations. Aujourd’hui âgé de 83 ans, il continue d’aller faire son tour à l’usine, de temps à autre. 

Alexandra, elle, témoigne que ce qu’elle vit avec son père est totalement différent de ce que son père et son grand-père ont vécu.  «On a la chance d’avoir plein de choses en commun. On fait beaucoup de sport ensemble; beaucoup de snowboard et de vélo de montagne. On a beaucoup de loisirs en commun, ce qui fait qu’on ne pense pas nécessairement toujours au travail. On a les mêmes valeurs, tant au niveau professionnel que personnel, donc on s’entend super bien», relate-t-elle. 

Le père et la fille parlent d’ailleurs tous les deux de l’importance de l’équilibre dans la vie. Martin rappelle que la vie passe vite et que le temps est limité. 

De son côté, Alexandra raconte que son père ne lui a jamais demandé de prendre la relève. Il lui a tout simplement dit de faire ce qu’elle souhaitait et aimait. À la fin de ses études, la jeune femme souhaitait d’ailleurs prendre de l’expérience ailleurs. Comme il y avait de beaux projets pour elle au sein de l’entreprise, elle est restée. Puis, de fil en aiguille, les projets se sont enchaînés, au point où elle ne se voyait plus quitter, tout simplement. Elle a su faire sa place; elle a «fait toute l’usine», des étiquettes au classement de papier, toute jeune, en passant par le magasin de pièces. Plus tard, en travaillant sur l’implantation d’un nouvel ERP (système de gestion), elle a vu tous les processus de tous les postes. 

Elle dit avoir une très belle collaboration avec le comité de direction. Pour elle, les membres qui y siègent sont des alliés. «On y va une étape à la fois, là aussi. Je veux faire ma place et non pas prendre ma place parce que je suis la fille du boss.»

Elle a une belle vision de croissance pour l’entreprise, mais souhaite rester loin de la pression, tout en commençant à penser à la relève. Alexandra dit être consciente de ne pas avoir tous les talents et ne souhaite pas reprendre l’entreprise seule. Elle dit avoir de la chance d’être entourée d’une belle équipe. L’un de ses souhaites les plus chers : conserver les racines de l’entreprise familiale, tout en continuant de la faire grandir. 
Retour à la liste des nouvelles